... une petite graine de buis tombée de sa coquille protectrice. Elle a roulé et s'est coincée entre la marche et la contremarche d'un vieil escalier de grès rose.
L'hiver est arrivé, le gel a sévi, la neige est tombée. La petite graine, bloquée dans sa prison de grès, a dormi d'un long sommeil. Les premiers rayons du soleil l'ont gentiment réveillée et au printemps elle a pointé joyeusement le bout de ses premières feuilles.
Il était une fois une maman jardinière qui empruntait quatre fois par jour ce long escalier qui menait à l'école du village. Elle avait l'œil pour repérer les cadeaux de la nature. Elle eut vite fait de découvrir les deux petites feuilles vertes qui s'élançaient hors de leur carcan de pierre.
Ainsi coincé, ce pauvre petit semis n'avait aucune chance de survie. Elle décida donc de l'adopter. Ce ne fut pas chose facile de le déloger car le bougre était déjà profondément enraciné.
Patiemment, année après année, elle l'a taillé, coupé, arrondi jusqu'à obtenir une jolie boule. C'était sa plus belle réussite de jardinière. Elle en était fière. Partir de quelques feuilles pour arriver à une silhouette régulière et bien ventrue.
Mais il y a quelques années, un vilain papillon est arrivé au village. Elle en avait entendu parler, elle a vu dans certains jardins des arbustes totalement dénudés mais chez elle, rien, pas la moindre petite feuille grignotée. Elle se sentait à l'abri, protégée par je ne sais quel dieu providentiel.
Et puis un jour, une puis deux puis trois puis des dizaines de chenilles sont apparues comme par magie.
Elle avait bien vu le papillon dévastateur dans son salon quelque temps auparavant, l'avait écrasé sans pitié et s'était crue débarrassée du fléau. Erreur, grave erreur. Il n'était que l'annonciateur de sa bande de copains.
Le jet d'eau, le sécateur (paix à leurs âmes) ont vainement tenté d'apporter une solution. La boule s'est retrouvée toute nue et faisait peine à voir.
Au printemps suivant, une puis deux puis des dizaines de feuilles ont percé les branches et quelques mois plus tard, il n'y paraissait plus rien.
La jardinière a repris espoir ... jusqu'au milieu de l'été lorsque les grignoteuses sont revenues.
Il était une fois une belle boule de buis qui m'a apporté satisfaction et fierté mais que je vais arracher avec tristesse dès le printemps. J'en garderai quelques jolies photos qui entretiendront le souvenir.
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